Pour l’atelier d’écriture de Leiloona. En s’inspirant d’une photo, écrire un court texte, juste pour le plaisir d’écrire.

– Hey Cath, viens voir ce que j’ai trouvé?
Charles apparut là-haut dans la pénombre, cadré par la trappe d’accès au grenier. Il tenait entre ses mains un coffre couvert de poussière.
– Wow, dit Catherine, c’est quoi ça?
– Viens m’aider à le descendre, je veux voir ce qu’il contient, lança Charles, fébrile.
Catherine tint l’escabeau, tandis que Charles descendit prudemment du grenier. Il alla déposer le coffre sur la table du salon et Catherine vint le rejoindre avec un chiffon pour dépoussiérer la trouvaille. Le coffre de bois sombre était abondamment verni et semblait très ancien avec ses ferrures bronze laiton et ses poignées de cuir qui sentaient une époque révolue.
– Il est magnifique, s’exclama Catherine.
Le couvercle bombé couina quand Charles le souleva doucement. Il sourit, satisfait qu’il ne soit pas verrouillé, mais rapidement la déception se lut sur son visage. Il ne contenait que quelques livres, des herbiers. Rien d’autre.
– « Louise D. 1898 » lut Charles d’un ton neutre en prenant un des livres. Dommage, c’est pas aujourd’hui qu’on va devenir riche ma belle Cath!
– Laisses-moi regarder, dit Catherine en lui subtilisant l’herbier des mains et s’assoyant sur le canapé tandis que Charles continuait d’inspecter le coffre, se demandant s’il pourrait en tirer un bon prix.
Tournant les pages jaunies, sèches, rigides et légèrement ondulées, Catherine réalisa rapidement que l’herbier n’avait rien de conventionnel. Louise D, n’avait pas cherché à répertorier plantes ou fleurs dans son herbier, mais plutôt des souvenirs, des pensées volées, des moments de vie qu’elle avait voulu figer dans le temps. Sur chaque page, une fleur maintenant sèche et rabougrie était accompagnée d’un texte, magnifiquement calligraphié, dont le choix et la musicalité des mots, laissait flotter en elle, un subtil parfum de bonheur. Plus qu’un herbier, c’était un journal poétique intime qui au départ, avait dû être superbement enrichi par le parfum des fleurs. À la dernière page, ce poème prophétique venu d’une autre époque:
Comme un oiseau léger, la main de l’indiscrète
Preste, et pourtant sans hâte, erre, et tourne au hasard
Les vieux papiers jaunis, et la boîte secrète
Aux tendresses gardées ; rien n’échappe au regard.
Et railleuse d’abord, la fillette examine
Ces lettres du passé, ces choses d’autrefois,
Relit des bouts de phrase en souriant, mutine,
Et ces fleurs desséchées et ces tendres émois.
De tout cela, très doux, un parfum vague émane,
Subtilisé dans l’air, chypre mêlé d’iris,
Une odeur d’ancien temps, de rose qui se fane,
Essence de Cythère et bouquets de Chloris.
Dentelles embaumées fleurant la bergamote,
Gants tout imprégnés d’ambre et sachets d’oliban,
Evoquant ce Jadis qui dansait la gavotte,
Gracieux et poudré, dans un salon d’antan.
L’enfant que le parfum troublant du coffre enivre
Ouvre un petit écrin d’aspect mystérieux ;
Il lui semble sentir tout ce passé revivre,
Respirer doucement d’un souffle harmonieux.
*Tiré du recueil Fleurs d’exil de Fernand Prévost de Belvaux
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