La neige a fondu dans les rues et le soleil joue à cache-cache derrière les nuages poussés par le vent. La rue est quasiment déserte, dans ce quartier résidentiel, à deux pas du parc où les jeux d’enfants sont encore couverts de neige. Je suis à quelques rues de chez moi, de retour d’une belle et longue marche printanière.
Le but de hockey a été installé dans la rue, en bordure du trottoir et un père, début trentaine, joue au hockey-bottine avec ses deux fils chaudement vêtus de leur habit de neige; L’un en rouge, l’autre en bleu. Le plus jeune n’a pas 5 ans. Il garde les buts, tandis que son frère un peu plus âgé, en milieu de rue, se dirige en zigzaguant vers lui, l’air concentré en maniant la balle orange avec un bâton beaucoup trop grand pour lui. Il s’approche, feinte à gauche, lance…ET COMMMMMPTE!. Soulevant son bâton dans les airs, il crie sa joie sous les yeux de son père souriant et sous les applaudissements des milliers de spectateurs qui peuplent son imaginaire. Son jeune frère, déçu, frappe le sol avec son grand bâton et laisse échapper un « argggh ».
Le père se mêle au jeu, prend possession de la balle, déjoue aisément ses deux fils, qui sont maintenant à la défense et d’un lancer du poignet, enfile facilement la balle dans le filet désert, levant lui aussi son bâton et laissant échapper un cri de victoire. Le plus jeune dit alors « Mon nez coule, on arrête de jouer! ». « Tu veux arrêter, parce que ton nez coule… » lui répond le père d’un ton sarcastique. Silence. L’enfant essuie son nez avec la manche de son habit de neige et le jeu reprend.
Je continue mon chemin, me disant que si la mère avait été là, elle serait allé essuyer le nez de son fils. Peut-être aurait-elle également voulu égaler les chances et permettre aussi au plus jeune de compter un but. Souvent, les rôles des parents sont ainsi fait que l’un écoute et console alors que l’autre le pousse à dépasser ses limites.