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Trophée

Publié: 16 mars, 2024 dans Écriture, Fiction
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Pour l’atelier d’écriture d’Alexandra K, en s’inspirant d’une photo, écrire un court texte, juste pour le plaisir d’écrire.

@animoart

Le courage est un trait héréditaire qui n’a pas de genre, du moins c’est ce qu’en disent les historiens concernant la famille de Marie-Madeleine Jarret de Verchères, cette famille devenue célèbre au 17ème siècle en Nouvelle-France, notamment par les faits d’armes de cette jeune femme ainsi que ceux de sa mère, qui toutes deux participèrent à de violents combats à des époques différentes en arrivant même, presque seules, à repousser certaines attaques d’iroquois qui voulaient s’en prendre à leur famille et communauté. Les femmes de cette famille dégageaient une aura de force et de bravoure qui imposait chez leurs ennemis, le même respect que les hommes prenant part aux combats.

Au sein du peuple iroquois, on tenait le courage en haute estime, autant chez leurs guerriers que chez leurs ennemis. Savoir affronter la souffrance, ne jamais afficher sa peur, que ce soit face à la torture ou même en sachant sa mort probable est un acte courageux qu’ils valorisaient fortement et recherchaient également pour eux-mêmes. Après un combat victorieux, pour s’approprier la force et le courage d’un ennemi vaincu, les guerriers iroquois allaient parfois même jusqu’à manger le cerveau des combattants et ils s’emparaient systématiquement du scalp de leurs victimes parce que c’était là que résidait, selon eux, l’âme du mort, puisque les cheveux continuaient à pousser après leur décès.

Moins célèbre que sa sœur ou sa mère, Elisabeth Jarret de Verchère avait également hérité de ces mêmes gènes de courage et il lui arrivait régulièrement, au mépris du danger, de quitter seule le fort pour cueillir des plantes ou champignons dans les bois environnants. Elle le paya malheureusement de sa vie le 8 août 1694, quand elle fut attaquée et tuée par trois guerriers iroquois qui rodaient par là. Quand il revinrent au village, c’est avec fierté, que les guerriers exhibèrent son scalp en lançant un cri de victoire.

Atelier d’écriture de Leiloona.

En s’inspirant de cette photo de Leiloona, écrire, juste pour le plaisir d’écrire.

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Il avait suffit d’un battement de cœur pour orienter la vie et les croyances du jeune Gabriel. À l’époque, il avait 9 ans. Un matin de septembre, alors qu’il parcourait nonchalamment la grève à marée basse, il avait vu de ses yeux vu, le battement de cœur d’une pierre qui se dorait au soleil sans savoir qu’elle était observée. Ce fut pour lui une stupéfiante révélation. La vérité s’imposait dramatiquement: Les pierres sont vivantes. Vivantes! À compter de cet instant, Gabriel commença à recueillir obsessivement des pierres pour peupler son zoo minéral. Elles étaient toutes uniques de par leur forme, leur couleur, leur texture. Il aimait les classer et reclasser encore et encore selon les différentes catégories et le soir avant de s’endormir, il s’installait à plat ventre, au bout de son lit et observait pendant de longues minutes sa collection étalée sur sa table de travail, souhaitant secrètement être à nouveau témoin d’un battement de cœur. En vain.

Ce moment unique l’avait cependant amené à élaborer une théorie sur la vie des pierres. Ainsi, selon Gabriel, les pierres vivent tout simplement à un rythme totalement différent du nôtre et surtout infiniment plus lent. Elles peuvent vivre des milliers, voire des millions d’années, mais leur cœur ne bat qu’à un rythme d’un battement par dizaine ou même par centaine d’années. C’est pourquoi on dit qu’elles sont faites de matière inerte, mais ce qu’on croit être sans vie ne l’est pas forcément. Dirait-on, par exemple, qu’un colibri est plus vivant qu’un être humain parce que son cœur cadence à 1200 battements par minute? Mais non, la vie c’est la vie. Alors, selon la même logique, un cœur qui bat à un rythme extrêmement lent n’est pas sans vie pour autant.

En grandissant, Gabriel étendit sa théorie à toutes les matières dites inertes et sa perception du monde évolua en ce sens. Que ce soit, un bout de papier, un bibelot, une chaise, un livre ou une fourchette, Gabriel accorda à tous ces objets, la même attention que s’il caressait un chaton. Il développa ainsi une solidarité très forte à tout ce qui l’entoure et du coup se senti toujours en communion intime avec l’immensité de l’univers vivant. Ne me croyez pas sur parole, répétait Gabriel. Essayez-le par vous-même. Touchez un objet autour de vous qui vous semble inerte, allez faites-le, caressez-le doucement du bout du doigt, imaginez-y la vie et vous verrez bien.